Là où le crépuscule s’unit à l’aube – Marina Dédéyan

Résumé

Une fresque russe familiale dans les pas de Lou Andreas-Salomé, Rilke, Nabokov, Fabergé et bien d’autres encore. Ils rentrèrent en traîneau à Saint-Pétersbourg, dans le paysage bleuté de l’hiver. Les sapins, les bouleaux et les trembles se détachaient sur fond blanc telles des gravures à la pointe sèche. Le froid et le silence figeaient le monde dans une immuabilité rassurante. Le crissement des patins, le halètement des chevaux, le claquement du fouet, chaque son prenait une intensité particulière dans la pureté de l’atmosphère. La neige effacerait vite les deux sillons laissés derrière eux, la vie comme un passage. Dans cette fresque russe, Marina Dédéyan explore la mémoire familiale pour retracer l’histoire de ses arrière-grands-parents au tournant du XXe siècle, entre grandeur d’avant-guerre et tourmente révolutionnaire.

Avis

Là où le crépuscule s’unit à l’aube est une sorte de roman biographique dans lequel l’auteur, en souvenir de sa grand-mère, sa « baba », retrace la vie de ses aïeux russes de la fin du XIXème siècle à la révolution qui a à jamais changé la face de ce vaste pays.

Merci beaucoup à Babelio et aux éditions Robert Laffont pour l’envoi de ce livre. Je m’intéresse actuellement de très près à la Russie du siècle passé, et j’ai adoré parcourir la ville de Pierre au fil des pages de cet ouvrage. Le dépaysement est total, j’ai vraiment eu l’impression de me retrouver sur les rives de la Neva.

J’ai aussi apprécié la plume de l’auteur, très élégante, sans être lourde ou pompeuse. Je n’en dirais cependant pas autant du récit en lui-même, qui tient un peu trop du panégyrique à mon goût. Je comprends que Marina Dédéyan soit fière de tous ces grands noms que ses ancêtres ont côtoyés, et auxquels elle est pour certains apparentée, et je ne pense pas qu’elle ait cherché à s’en vanter, mais une très grande partie du roman, sans parler de ses interventions personnelles, se focalise là-dessus.

Et les fréquentes descriptions de réceptions, de mondanités, de ballets, d’objets d’arts, de demeures plus somptueuses les unes que les autres… accentuent ce sentiment. J’ai trouvé qu’il se dégageait des deux premiers tiers de ce livre une certaine vanité, à laquelle j’avais, pour être franche, hâte de voir la révolution mettre un terme.

Je crois néanmoins que mon principal problème, ç’a été Julia. Je n’ai pas pu la supporter. Plus exactement, je l’ai prise en grippe à l’instant où elle en a fait de même avec sa fille aînée, à qui elle a gardé rancune d’une « erreur » dont elle n’était certainement pas la cause, mais uniquement la conséquence. Et le fait que, par la suite, on voie davantage Julia s’occuper de ses poules que de ses autres enfants, qui ne sont quasiment évoqués qu’à leur naissance, ou pour indiquer qu’ils se trouvent avec une nurse, ne m’a pas donné une meilleure opinion d’elle.

Pour toutes ces raisons, j’ai largement préféré la tournure prise par le récit à partir de la chute du tsar et de l’ascension des bolcheviks. Moins de faste, plus d’interactions entre Julia et ses enfants… Je regrette que l’auteur ait choisi de s’attarder aussi longuement et en détail sur des éléments qui permettent certes de souligner la grandeur passée de la Russie à l’échelle de l’Histoire, mais qui sont superficiels au regard de l’histoire avec un h minuscule, et qui m’ont donné cette impression que Julia s’intéressait plus aux danseurs et autres artistes en vogue qu’à sa propre famille.

Peut-être y a-t-il simplement beaucoup trop de « personnages », si j’ose les appeler ainsi, puisqu’il s’agit d’individus ayant réellement existé. Je parle des enfants de Julia car c’est ce qui m’a le plus marquée, mais il n’y a pas qu’eux qui souffrent de cette mise en retrait. Ses parents, sa sœur, les membres plus ou moins éloignés de la famille de William… se volatilisent parfois pendant des dizaines et des dizaines de pages, pour réapparaître sous la forme d’une mention rapide, puis retomber dans l’oubli pendant d’autres dizaines de pages.

Au final, je ne sais pas trop quoi penser de ce livre. Il est vraiment bien écrit, et témoigne d’un travail de reconstitution admirable, mais pèche selon moi en s’appesantissant sur la vie luxueuse, raffinée et heureuse menée dans un premier temps par les Brandt, au point d’en devenir redondant, et surtout au détriment d’autres éléments relégués à l’arrière-plan.

Et comme j’ai autant apprécié de découvrir cette Russie d’antan que j’ai détesté Julia, je dirais que je suis plutôt partagée, mais c’est vraiment un avis très subjectif, qui n’enlève rien aux qualités intrinsèques de ce roman. Je vous invite à le lire et à vous faire votre propre idée, surtout si vous êtes tentés par un voyage dans le Saint-Pétersbourg de Nicolas II.

Note : 3.5 / 5

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